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Made in local. Emploi, croissance, durabilité : et si la solution était locale ?

Raphaël Souchier, 2013, Eyrolles, 312 p


Raphaël Souchier anime, dans le cadre des programmes de l’Union européenne, des réseaux de coopération entre collectivités territoriales et universités de tout le continent. L’auteur s’interroge ici sur les vertus du local et prend exemple sur un grand nombre d’initiatives surtout américaines, toutes favorables à la qualité de notre nourriture, l’énergie, la santé et l’économie territoriale. Cela va de la création de mouvements locaux de nourriture à la relocalisation industrielle, de l’invention d’outils de financement à celle des médias de proximité. Quelques initiatives en matière de relocalisation agricole et de l’amélioration des modes culturaux en faveur de la santé et de la préservation de l’environnement sont aussi développées. 


La France, championne d’Europe des grandes surfaces et des zones commerciales situées en périphérie. «La France est devenue, depuis les années soixante, la patrie des grandes surfaces (rapportés au nombre d’habitants, les hypers y sont 2,8 fois plus nombreux qu’en Italie et 1,3 fois plus qu’au Royaume-Uni), avec pour conséquence une implosion du commerce de proximité indépendant (...). 68% des communes n’ont plus d’épicerie. Pour acheter leur nourriture. Pour acheter leur nourriture, 62% des Français doivent se rendre en périphérie des villes, généralement en voiture, contre 33% des Allemands. La grande distribution, qui fonde son modèle non sur l’épaisseur de la marge mais sur une rotation rapide du capital investi, a fait des prix bas son argument fétiche. Le consommateur y a gagné en pouvoir d’achat, mais se sent désormais otage d’un système omniprésent dont il perçoit les limites (gaspillage, temps perdu, conditions sociales...).» (72)

On subventionne un système agricole bien moins rentable écologiquement qu’autrefois. L’agrochimie consomme bien plus d’énergie par unité produite que l’agriculture traditionnelle. «(...) comme le souligne Michael Pollan, «les fertilisants chimiques (tirés du gaz naturel), les pesticides (tirés du pétrole), et la transformation, l’emballage et les transports modernes ont transformé un système qui, en 1940, avec chaque calorie sous forme d’énergie produisait 2,3 calories sous forme de nourriture, en un système qui consomme 10 calories d’énergie fossile pour produire chaque calorie de nourriture de supermarché moderne.» L’absurdité apparait «quand on se rappelle que chaque calorie que nous mangeons est, en fin de compte, le produit de la photosynthèse, un processus qui produit gratuitement la nourriture à partir de l’énergie du soleil.» (83-84)


Risque pour l’agro-écologie et le bio de demeurer de simples niches commerciales si l’on n'engage pas dès maintenant de modifications globales de nos propres modes de production et de consommation. «Mais comme le rappelle Vincent Tardiez, sans un bouleversement parallèle des structures professionnelles, des marchés, du modèle de consommation dominant et de l’organisation des territoires, des agro-écologies demeureront des «niches commerciales»

Des politiques de production agricole à repenser à l’échelle des territoires voire des terroirs «pour permettre d’atteindre un niveau optimal de qualité et de sécurité alimentaire. Mais aussi pour préserver la santé, la diversité et les ressources et faire que le système de nourriture de chaque territoire devienne plus autonome et résilient. Cette approche est fondée sur la mobilisation des professionnels et des décideurs publics, mais aussi de la population, autour d’un projet de «Food Shed», que nous traduirons par «bassin de nourriture» par analogie avec les notions de «bassin de vie» ou de «bassin versant». Comme notre «terroir», cette notion anglo-saxonne tient à la fois compte de la géographie naturelle (sols, végétation) et humaine (activités, habitat).» (101)


Les ordonnances de santé qui permettent, par une nourriture appropriée, de retrouver la santé en retissant le lien entre soi-même, la société et la nature. «Plus innovant encore : conscient qu’il vaut mieux prévenir que guérir, cinq hôpitaux et cliniques du comté (Michigan) ont inventé les «ordonnances de santé». Le médecin prescrit à ses patients démunis dont l’alimentation est déséquilibrée des fruits et des légumes frais qu’ils peuvent se procurer gratuitement sur deux marchés de producteurs partenaires. Financé par la fondation Kresge, ce programme est coordonné par le service de santé publique du comté. Il s’agit en fait de retrouver la santé en retissant des liens avec soi-même, la société et la nature.» (115)

La solution à une nouvelle agriculture par les systèmes locaux de nourriture favorables à la santé, la terre et l’économie local. «Au plan national, les systèmes locaux de nourriture sont d’abord apparus en Californie du Nord, dans l’Oregon et l’Etat de Washington, où existe une tradition de marchés alimentaires locaux et bio. Les régions urbaines sont, elles aussi, particulièrement sensibles à ce thème et cherchent à développer l’agriculture urbaine pour réduire leur très faible autosuffisance alimentaire. Le mouvement s’étend [...] A plus long terme, ce modèle novateur peut pourtant compter sur deux atouts maîtres : son haut niveau de performance économique, sociale et environnementale et sa faible dépendance vis-à-vis des ressources fossiles, dont le prix ne fera que croître.» (120) «Ici comme ailleurs, pour accomplir la mutation vers un système de nourriture réellement pérenne, il faut dès maintenant préparer la prochaine étape. Gary Nabhan souligne qu’à ce jour aucun système local de nourriture n’a encore été entièrement repensé pour répondre aux trois objectifs simultanés de santé des terres, santé humaine et santé économique de la communauté locale. Pour cela chaque système devra évaluer puis restructurer ses atouts et ses modes de fonctionnement afin que la priorité absolue soit données à l’équité, à la durabilité et à la résilience.» (121)

Santé-Goût-Terroir

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